pretty places /pey

Le néon du P3 grésille, vacille un instant avant de reprendre de ses couleurs. Un bleu trop pâle du coup de la vaudou qui préfère un vrai bleu électrique – digne d’un néon, en somme – associé à un rose tout aussi faiblard qui ne la convainc pas. Si elle se doit de juger l’ange-gardien-crazy-bitch-something de Nate sur le design de la boîte qui appartient à sa famille, Sunny met une mauvaise note. Direct. Y a des choses avec lesquelles il ne faut pas déconner et le choix des couleurs sur un néon en fait parti (en plus, elle croit bien avoir compris qu’elles sont pas que trois, finalement, chez les Halliwell alors faudrait peut-être penser à l’update, cette enseigne pour que ça devienne finalement les P54 avec quelques Y ou X glissés au milieu – pas qu’elle se soit beaucoup renseigné, Sunny, mais quand même ; si l’une de ces Halliwell est censée assurer les arrières de son pote, elle préfère être certaine de la marchandise, elle). Son air blasé ne laisse pas de place au doute quant à ce qu’elle pense donc du club et son regard juge ceux qui se précipitent à l’intérieur en tirant la porte avec un large sourire et des gloussements. They never set foot in a vaudou party and it shows. Elle inspire, attrape la porte avant qu’elle ne se referme et descend les escaliers dans l’obscurité ambiante rompue par les stroboscopes et les jeux de lumière. Y a du monde. Ca va pas lui faciliter la tâche. Elle tord la bouche, moue peu avenante tandis qu’elle rejoint finalement la piste de danse pour se frayer un chemin, ses yeux marrons scannant chaque visage qu’elle croit sans pour autant connaître celui qu’elle cherche – elle a assumé qu’elle saura qui est cette fameuse Patience-tarée-coincée qui mène la vie dure à Nate. D’après ce dernier, elle a la gueule de l’emploi ; light problem, toutefois, c’est qu’eux yeux de Sunny, tous ces visages blancs ont la gueule de l’emploi. Elle s’arrête au milieu de la foule dansante, un poing sur la hanche, le soupir s’exfiltrant de ses lèvres.
Fuck.
Ils pouvaient pas foutre de putain de name tag sur leurs fringues ?

Vingt minutes qu’elle fait semblant de danser parmi les uns et les autres, qu’elle s’infiltre dans les groupes pour essayer de trouver une Patience et Sun, elle a besoin d’un verre pour faire passer la frustration de n’avoir pas mis la main sur cette sorcière. Elle rejoint le bar, les doigts pianotant aussitôt sur la surface avant qu’elle ne reconnaisse un visage de l’autre côté, en train de servir des cocktails. Damn. What was her name again? Elle fronce les sourcils, Sunny, attend que l’attention soit tourné dans sa direction pour esquisser un geste de la main. « J’savais pas que tu bossais ici. » Pas qu’elle sache grand-chose, en réalité, si ce n’est qu’elles vont à la même université et qu’elle est une sorcière. Oh.
Wait.
Fucking Papa.
« Wait. T’es une Halliwell ? » qu’elle demande, incrédule, parce que même si ça lui évoque rien de particulier, à Sunny, elle sait ce que ça implique. Qu’elle connait la fameuse Patience. « Tu connais Patience ? » Elle touche de l’or, elle le sait, she can feel it. Elle est sur la bonne piste et boi, n’a-t-elle jamais été aussi heureuse d’avoir passé vingt-trois longues minutes dans un foutu nightclub qu’en cette soirée parce que ses efforts sont récompensés. Plus qu’à espérer que la Patience soit dans le coin pour qu’elle puisse enfin juger de la marchandise.

Le cœur tambourine encore contre sa poitrine, rythmé par l’excitation transcendant la jeune sorcière. Peu importe que plusieurs heures soient déjà passées, Peyton, elle n’arrive tout simplement pas à s’en remettre. Ses yeux se ferment dans l’espoir de refouler une nouvelle fluée de larmes, n’a vraiment pas le temps pour en corriger les conséquences. Le shift de Beth – devenu le sien suite à son appel de détresse - aurait dû commencer une bonne vingtaine de minutes auparavant. Pas le temps de laisser place à un autre craquage donc, à moins de le faire productivement sur la route mais là encore, elle préférerait se passer des yeux raton-laveurs que son maquillage créerait. Elle renifle. Souffle un bout coup. Elle peut le faire.

Ou pas. Les yeux brillants de folie, joues humides de la dernière cascade tombée, elle est un véritable mess en débarquant finalement au P3. Seule cette annonce se joue encore et encore dans son esprit, laissant ses autres capacités en total automatisme. Sans aucun doute la raison pour laquelle elle se retrouve sur les fesses à l’instant où elle passe l’entrée arrière du P3. Ouais, elle est dans son monde. Assez en tout cas pour n’avoir aperçu cette large silhouette qui lui semble encore plus impressionnante vu du sol. Le videur lui met déjà deux bonnes têtes quand elle est perché sur ses talons alors là… Ses sourcils se froncent lorsque son regard se pose sur son visage et elle ne peut empêcher une grimace venir déformer le large sourire incrusté à ses lèvres. N’essaie même pas d’imaginer l’image horrifiante qu’elle doit arborer. Deux larges paluches viennent se glisser sous ses aisselles et plop, elle se retrouve de nouveau sur ses deux pieds. « What’s goin’ on, sweetheart ? » qu’il grogne, parce qu’avec cette voix grave et rocailleuse, tu peux que grogner. Alors, elle ricane. Ca aussi, elle peut pas s’en empêcher. Peu importe qu’elle le côtoie depuis des mois maintenant. Cette voix, cette apparence contraste brutalement avec sa personnalité de bébé labrador et elle trouve ça simplement hilarant. « I’m gonna be an auntie ! » qu’elle annonce délectée avant de se jeter dans ses bras. Free hug pour tout le monde ce soir, elle a du bonheur à partager. « Congratulations, Peyton. » Raclement de gorge, pat-pat gêné sur son dos, elle le remercie avant de lui accorder grâce et le libérer de son emprise. « I’m so excited ! » L’enthousiasme s’exulte de chacun de ses pores,  illumine son large sourire. Quand elle repense à l’expression de sa grande sœur… Ouais, ça va être dur de se concentrer ce soir. Surtout si… Oh non. Les larmes sont déjà de retour.

Un autre meltdown et ravalement de façade plus tard, Peyton enchaîne la préparation de cocktails. Par chance, le club est rempli ce soir, l’ambiance toujours électrisante faisant défiler le temps plus vite qu’elle ne l’aurait espéré. Un mouvement de main attire son attention et elle se tourne, étire son sourire à la reconnaissance de cette partenaire d’un jour de fac. « Oh Sunny, hey ! » L’université lui manque. Il n’y a que cette raison expliquant cette pique de nostalgie répercutant son torse dès qu’elle croise un étudiant. Pas pour les cours, bien sûr, d’un ennui mortel (faut dire qu’elle était mal orientée aussi) mais cette ambiance, ces possibilités d’aborder de nouvelles personnes à foison. C’est un des ses aspects préférés de ce job.  «  Yup, wasn’t supposed to tonight but one of the berman is sick. Well, her cat is sick. Something about eating her face cream... » Sa bouche se clape. Certainement plus d’informations qu’elle n’en a besoin.  « Anyhoo, qu’est ce que j’te sers ? » qu’elle enchaîne rapidement, glissant son regard sur la brunette. Mais les traits de la sorcière ne s’étendent pas d’indifférence, comme elle le prédisait, mais d’incrédulité. « Hmm, yeah ? » Ca sort comme une question. Parce qu’elle se demande comment elle en est arrivée à cette conclusion, s’attendait vraiment pas à cette question. « Yup, c’est ma cousine. » Ni à celle-là, d’ailleurs. « Tu la cherches ? J’savais pas que tu la connaissais. » Certes, elles étudient à la même université mais comme des centaines et centaines autres personnes. Oh, peut-être qu’elle fréquente elle-aussi son herboristerie.  « Il me semble pas qu’elle doit passer ce soir. » ajoute-t-elle d’une moue. Pas qu’elle se souvient en tout cas. Mais elle est curieuse maintenant, parce qu’elle a beau chercher, elle voit vraiment pas le lien qui pourrait la joindre à sa cousine.

Ding ding ding, la cloche de la chance qui vient de sonner — et qui résonne maintenant à ses oreilles comme un tintement de victoire. She did it, elle est fière, la vaudou, même si elle n’a pas fait grand-chose, en réalité (et qu’une bouche mal intentionnée dirait qu’elle avait toutes les chances de marquer le gros lot en mettant les pieds dans cet endroit) mais elle ne va pas trop s’attarder sur ces détails. Parce qu’elle tient devant elle la personne qui pourra sûrement lui fournir des réponses à sa curiosité sans faille et que, héhéhé, elle va enfin pouvoir prendre Nate de court. Elle se voit déjà le teaser comme il ne le lui permettrait pas, lui balancer qu’elle a fait amie-amie avec sa wightlighter-gardian-angel pour le plaisir simple de voir son visage se défaire un peu plus. Et le faire paniquer un peu. Parce qu’il n’y a rien de plus délectable que de voir Nate perdre de son assurance et voir ses traits se décomposer (et lui instiller une petite vague d’angoisse, rien de bien méchant parce qu’elle n’est pas comme ça, Sunny — pas avec lui, en tout cas, parce qu’il est son pote depuis bien trop longtemps pour que ça fonctionne). Elle retient le sourire en coin, Sunny, toujours incapable de retrouver le nom de la Halliwell qui lui fait face but who cares, en cet instant. Elle babille un peu trop de son goût alors elle penche la tête sur le côté, Sunrise, un sourcil qui se fronce, le coin des lèvres qui essaie de dissimuler l’ennui qui pourrait s’emparer d’elle. « I meant it general. But sorry about her cat. I guess. » Ses traits n’en laissent rien deviner, toutefois, parce qu’elle est loin de ressentir la moindre miette de condoléance pour l’animal malade et probablement à l’agonie. Elle n’a pas beaucoup plus d’empathie pour les animaux qu’elle n’en a pour les être humains, Sunny, parce qu’elle se vante (et veut continuer de pouvoir le faire) d’une totale impartialité et d’un traitement totalement égalitaire. Seule exception faite avec Nate. Elle lève les yeux sur les bouteilles qui surplombent le centre du bar, la bouche tordue. Right now, elle se prendrait plutôt une petite fusette ou un p’tit champi, en réalité. L’ambiance festive du P3 n’est pas dans ses moeurs habituelles, elle qui côtoie les psychotropes depuis bien trop longtemps. « Surprise me. » Elle n’a pas réellement l’intention de boire, de toute façon (pas ici, en tout cas). Préfère plutôt enchaîner avec sa question et mettre rapidement sur le tapis le sujet qui l’intéresse réellement et qui est la cause de sa présence ici. « I don’t. Know her, » qu’elle ajoute après un court silence parce que la chercher, si, elle est coupable. « She knows my friend. She’s like his gardian angel or something like that? » Les termes exacts loin d’être son fort quand ça concerne la magie blanche. « He talks about her a lot. Complains is more accurate actually so I was curious. » Elle précise sans trop savoir pourquoi, avec peut-être l’espoir que ça puisse changer quoique ce soit sur sa présence (ou plutôt, absence de présence) dans les lieux. Mais ça semble tomber à plat, pas de Patience ce soir, évidemment. Un complot, probablement, pour la tenir éloignée de la dumbass-psycho qui mène la vie dure à son pote. « Not that I think she’s terrible, she just seems… Fun. Ish. Not, that ain’t right. He just doesn’t just to be himself when he talks about her, doesn’t use the same words or expressions he usually does when talking about a girl, y’know? Wanted to know how much of it was him trying to get into her pants and how much was true, I guess. » Pas sûre que ce soit une bien meilleure approche face à la cousine de la concernée mais Sunny n’est pas du genre à s’emmerder de ses paroles. Ni même à chercher à savoir si elle blesse quelqu’un avec sa franchise tranchante.